@TOS 6 Paris — La diversité de convictions comme une richesse
https://youtu.be/d4-rpq8dNKI si vous voulez voir le ToS en vidéo.
Les photos sont présentées avec des hashtags (#) et des mots-clés, que je détaillerai en-dessous de chaque photo, pour l’audiodescription.
Bonjour. Je m’appelle Christophe. Je suis particulièrement ravi de vous parler ce soir. Je vais vous parler ce soir d’un projet qui s’appelle Interfaith Tour Africa. Un voyage qui a déjà eu lieu, l’été 2016 avec deux objectifs :
- faire vivre à l’équipe un projet de vie commune, non pas malgré mais grâce aux différences ;
- et interviewer des responsables religieux, politiques, sociaux, culturels, environnementaux et entrepreneuriaux, bref toutes celles et ceux qui agissent pour la cohésion sociale, le vivre ensemble et la Paix.
L’équipe est composée d’Héléna, jeune femme, Française, musulmane, Normande, vingt ans, étudiante juriste, passionnée d’athlétisme et de lecture ; de Saïkou, Guinéen, vingt-cinq ans, étudiant à Toulon, qui aime la cuisine asiatique et le foot de rue avec les réfugiés, et qui se déclare libre-penseur ; et moi, 35 ans, Breton, catholique, qui aime parler, prendre des photos et l’économie sociale et solidaire.
On part tous les trois dans une aventure avec un défi : à l’hiver 2015, six mois avant le départ, on ne se connaît pas. Et on va aller visiter l’ensemble des pays sur la carte au-dessus, et interviewer celles et ceux qui agissent pour la diversité.
Tunisie, 1er Juillet, première claque : il fait trente degrés la nuit, près de quarante à quarante-huit degrés Celsius la journée. Au départ de Marseille, j’ai chargé trente kilos de bagages. Pour celles et ceux qui ont voyagé, vous savez ce que ça signifie à porter. J’ai quinze kilos de cadeaux en plus de mes affaires dans un sac à dos. C’est la période de Ramadan. Je suis le seul à ne pas jeûner et pourtant je morfle sévère. Toute sortie de chez notre hébergement est un effort. On souffre toutes et tous, mais ensemble.
Au Maroc, dix jours après, la claque qui vient c’est notre rencontre avec un rabbin qui une fois en confiance nous parle de l’attaque à la hache au visage qu’il a subie et que depuis, son combat est de rester vivre sur place et d’éviter qu’il y ait un caractère anxiogène au sein de sa communauté.
Trois jours plus tard, l’équipe est devant le Consulat de France au Maroc. Suite aux attentats qui ont eu lieu à Nice le 14 juillet, on se retrouve à interviewer Ahmed Ghayat, fondateur de l’association Marocains Pluriels, qui nous témoigne de son identité musulmane et marocaine, et également de l’importance qu’il y a là de jouer la carte de la pluralité tous ensemble.
En comparaison à cette ambiance pesante en début de voyage, le point le plus positif alors est d’être invité au mariage d’un couple d’amis. Ce que je perds en eau et sueur, je le gagne en huile et en pâtisseries.
Là, vous me voyez serein, regardant au loin. Beau gosse ! L’équipe est au Sénégal. On fait la traversée depuis l’Ile de Gorée, retour après une visite. Je vous ai dit que je suis Breton. Je ne vous ai pas dit que j’ai le mal de mer. Cela aurait été trop beau, évidemment. Trente minutes de traversée, je bouillonne à l’intérieur. Mais ça valait vraiment le coup de voir ce point historique sur l’Humanité !
Douze ans après un premier voyage au Burkina-Faso, j’y reviens. Et notamment là, on plonge dans les religions traditionnelles africaines. Personnellement, avant les chefs coutumiers que je rencontre, mes seules références concernant les fétiches, c’est Kirikou ! Ce qui les fait rire. J’enchaine avec le fait qu’en Bretagne, des religions traditionnelles locales, je ne connais que Panoramix et Astérix ! Dommage !
Ce voyage ne peut se faire que par un esprit de fraternité. L’équipe est ensemble. Entre nous, on est d’accord pour ne pas être d’accord ! Profondément, on a rien en commun, à part trois choses :
- on ne boit pas de café,
- on ne fume pas et
- on ne boit pas d’alcool !
Ce qui nous soude finalement.
Ce qui nous soude également, c’est la passion d’Héléna pour l’athlétisme et donc les Jeux Olympiques. Et arrivés en Côte d’Ivoire, c’est l’étape la plus courte. Pourtant, alors même que nos divergences viennent se creuser, la plus grande crise que l’équipe va traverser se produit à cause d’une clé USB.
Donc, merci à Teddy et toute la délégation française aux JO pour nous remonter le moral à ce moment-là. On pleure de joie quand il gagne et d’horreur lorsque l’on perd la connexion parce qu’il pleut trop et que l’on est sans électricité. Heureusement, on verra la finale en replay et on célébrera ensemble quelques heures après.
A Conakry, je suis là en photo sur le “Télématin” local, “Kolomatin” ! Il est 7h du matin, je suis en tenue traditionnelle. On va être interviewés pendant 30 minutes. Hasard du calendrier de nos rendez-vous, deux heures après, je pitche notre projet devant le Ministre de la Jeunesse de la République de Guinée, pendant trente minutes. C’est improbable car on n’avait pas pris rendez-vous officiellement.
L’hospitalité est essentielle pour ce voyage. L’équipe vit chez les habitants, avec les habitants, afin de mieux comprendre leurs réalités locales. L’équipe n’est pas venue imposer un modèle ni des idées, mais bien de comprendre ces réalités. Ce point de vue est essentiel. D’autant que l’équipe terminera son parcours dans la propre famille de Saïkou en Guinée.
Reda que vous voyez sur cette photo est entrepreneur. Il fait partie de la communauté MakeSense. Je ne sais pas si vous connaissez, c’est une communauté d’entrepreneures sociales et d’entrepreneurs sociaux dans le Monde. Son témoignage va être phénoménal, car il va nous ouvrir des portes de compréhension transversale sur la jeunesse en Afrique, qui voit des problématiques, trouve non seulement des solutions, mais des solutions pérennes et locales.
Le voyage, comme vous l’avez vu, a un très joli logo. Cela fait partie des cadeaux que l’on offre. Ce sont les fameux quinze kilos de bagages en excédents que je porte. Ce sont des totebags et des badges à l’effigie du lion. Si vous repérez les personnes qui portent ces logos durant vos prochains voyages en Afrique, vous pouvez trouver des ambassadrices et des ambassadeurs de Paix.
Ce qui me réjouit maintenant, c’est des voir des jeunes Marocaines et Marocains et des jeunes d’Afrique sub-saharienne qui se sont rencontrés, afin de se connecter et promouvoir les idées, sans passer par l’équipe à l’origine du projet.
Je n’ai jamais autant cité mon identité complète : nom, prénom, âge, conviction, nationalité, ville de résidence, région de naissance, etc … que durant ces 62 jours et nuits. Bien plus qu’à l’accoutumée, au quotidien et même parmi mes années de militance associative précédentes.
En suis-je sorti blessé, heurté, mis à mal ? Non, au contraire, et c’était plutôt un sentiment de soulagement qui se dégage ! Je pense que cette aventure et nos témoignages quotidiens m’ont renforcé dans une volonté que toute personne puisse le faire aussi librement, pas juste moi, pas uniquement une aventure extraordinaire. Personne ne devrait à avoir à cacher une partie de qui elle ou il est, quelque soit ce qu’est son identité.
Je finirai avec deux citations :
- celle de Martin Luther King : “Apprenons à vivre comme des frères, sinon nous allons mourir comme des idiots.”
- et Antoine de Saint-Exupéry qui a écrit : “Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis.”
Pour moi, ce sont les maîtres-mots de ce voyage. Alors que six mois auparavant, nous étions des inconnus, j’ai gagné avec ce voyage une sœur et un frère en humanité !
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Bonus : voici mes réponses aux deux questions posées par le public, en fin de soirée.
- Es-tu toujours en lien avec tes deux amie et ami ? Quelles sont vos relations ?
Héléna et Saïkou vivent respectivement elle en Normandie et lui à Toulon. J’ai envoyé un SMS à Saïkou après mon passage pour le rassurer que ça s’était bien passé. L’équipe communique via Skype et Messenger à peu près dix-huit fois par jour. Pour ce pitch ToS, je me suis détaché un peu de ce que j’avais prévu, mais je leur avais fait tout valider auparavant. Evidemment, on continue d’avoir les mêmes problématiques sur lesquelles nous sommes en désaccord.
- A la fin du voyage, as-tu réussi à te peser pour savoir le nombre de kilos que tu avais pris ?
Je vis à Paris, chez des propriétaires charmants, qui me louent un appartement au cinquième étage, sans ascenseur. Arrivé le 1er septembre, avec en tête tous les impératifs de boulot car je reprends mon emploi juste ensuite, c’est en bas de chez moi, au pied de l’immeuble que je me rends compte qu’il me manque le digicode, que je suis au bout de ma vie et que je n’ai aucune idée des chiffres et lettres du code, et qu’il se met à pleuvoir. Une misère. Heureusement, mes proprios étaient réveillés et m’ont répondu vite.
Je n’ai pas monté les cinq étages d’une traite. J’ai plutôt fait cinq traites. Arrivé au troisième étage, j’étais plus qu’essoufflé. In fine, au retour, je n’avais pas encore touché mon salaire du mois. J’ai donc fait tous mes déplacements à pied, ne pouvant pas prendre ne serait-ce que mon pass Navigo mensuel. A mon retour à Paris, j’ai perdu cinq à six kilos.
Une anecdote si vous voyagez de façon internationale, bien souvent il y a des transports publics et privés. Les hôtes ou les inconnu.e.s ne vous laissent que rarement le choix de marcher à pied. Parce que les destinations sont éloignées. Parce que c’était Ramadan et qu’il faisait 48°C en plein soleil, je bois peu, je mange trop, je ne me dépense pas. Au Maroc et au Sénégal, si vous avez la peau claire, ça n’est pas vous qui prenez le taxi, mais c’est le taxi qui vous prend ! Il vous klaxonne :
- “Eh, le blanc, pourquoi tu marches ? ”
- “Parce que j’ai des jambes ! ”
- “Tu vas où ? ”
- “Juste là, à dix mètres.”
- “Allez, monte. Le quartier est dangereux.”
- “Non, le quartier n’est pas dangereux. Je vis là depuis dix jours. J’ai mes habitudes.”
- “Allez, monte.”
- “Non, merci. Je n’ai pas d’argent.”
- “C’est pas grave, monte quand même.” - Des anecdotes comme ça, j’en ai encore un paquet !
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J’espère que l’article ici vous a plu. Et si vous avez des questions, merci de me les faire parvenir : en commentaires Medium, via mes réseaux sociaux, via Traveler on Stage ou via Interfaith Tour Africa.